Plonévez - Gouézec

Une coupe pour la route !

La victoire, c’est comme la brandade de morue. Une fois que tu en as goûté, tu es accroché.

Il faut reconnaître que le coup des chaussettes à rayures a marché. Bravo. J’avais prévenu, le choc psychologique. Génial. Magistral. Souverain. Imparable. Quelques fils de laine et la transfiguration, la métamorphose, la mutagenèse ! Les gars ont marqué. Et pas qu’un but, non huit buts !Deux la semaine dernière et six ce dimanche. Y’a du miracle là-dessous, de l’étrangeté, de la bizarrerie, de la diablerie, du satanisme. Une paire de chaussettes et voilà un Jérôme qui marque trois buts en un seul match. Il y a du vaudou là-dessous, avec les amulettes, le sel et tout le bazar. Faut être objectif, on en parlera dans cent ans, je vous le dis ! Pourtant, lors de la sortie des vestiaires, j’ai remarqué un récalcitrant, un réfractaire, un rebelle, un insoumis.

Ou alors le président n’avait pas assez de sous pour équiper tous les joueurs. Ou les tricoteuses ne tricotent plus que des bonnets rouges, pas des chaussettes. Ou la Poste n’a pas livré les dites-chaussettes à la bonne adresse. Non, non, ce gars-là est un buté, un cabochard, un coriace. La preuve quelques secondes après le coup d’envoi, il marque le premier but.

En chaussettes noires. Unies. Sans rayures. La provocation au sens strict du terme. Un pied de nez au président-équipementier. Un bras d’honneur au trésorier. Alors nos deux abeilles de dimanche dernier, les récalcitrants, les contestataires, les grincheux,

Nos deux abeilles donc, ont profité de la situation suscitée par ce triste personnage…..L’un n’est pas venu, le pleutre, le poltron, prétextant un échauffement du mollet droit dû au frottement des nouvelles chaussettes. « Un érythème prurigineux déclenché par des chaussettes rayées, réaction allergique typique », d’après le certificat médical ….. Mmmmmm. L’autre, promu capitaine à la suite d’on ne sait quelle flagornerie mielleuse, servilité dont il est d’ailleurs coutumier, déclenche une remarque acerbe du président au moment du salut à la foule des spectateurs. Il faut reconnaître qu’il arbore, avec une audace ostentatoire, preuve d’une arrogance cynique, les chaussettes rayées tire-bouchonnant sur les chevilles, effaçant par là-même ce qui faisait le charme des chaussettes : les rayures.

L’instigateur de la révolte dite « des chaussettes rayées », une véritable jacquerie, est rapidement repéré par l’entraîneur et immédiatement puni…… . En cabane le gars !

L’agitateur est lui aussi puni et déchu son titre de capitaine. En cabane aussi !

Belle leçon. Certes, l’habit ne fait pas le moine, le match de foot n’est pas un défilé de mode et l’entraîneur n’est pas Karl Lagerfeld. Mais les gars ne seront jamais une troupe de guenilleux, de loqueteux ou de haillonneux. De la tenue, de l’allure, du style. Les chaussettes seront à rayures ou ne seront pas !

Et pis on est rentré.

AN